
Le rapport annuel 2024 du Conseil Économique, Social et Environnemental (CESE), adopté le 26 juin 2025 et rendu public fin septembre, agit comme un miroir tendu aux protestations de la Génération Z. Les revendications scandées dans la rue – emploi, dignité, justice sociale, avenir – trouvent un écho presque mot pour mot dans ce document officiel.
Le CESE met en avant un chômage des jeunes qui atteint 36,7 %, et grimpe à 48 % en milieu urbain. Pire encore, 61 % des diplômés du supérieur de 15 à 24 ans sont sans emploi, et 73 % des jeunes chômeurs n’ont jamais travaillé. À ces chiffres s’ajoute un quart de jeunes en situation de NEETs – ni en emploi, ni en études, ni en formation – avec un record de 37 % chez les jeunes femmes.
Cette impasse économique nourrit une crise sociale et psychologique. Le rapport établit un lien direct entre chômage prolongé, troubles anxiodépressifs et risque suicidaire. Il souligne aussi la tentation massive de l’émigration : plus d’un jeune sur deux (55 %) de 18 à 29 ans a envisagé de quitter le pays, principalement pour des raisons économiques et éducatives.
Face à ces constats, le gouvernement met en avant ses programmes – Awrach, Forsa, Intelaka, ANAPEC – mais le CESE lui-même dénonce leur dispersion et leur manque d’efficacité. Cette contradiction alimente la défiance d’une jeunesse qui, voyant ses perspectives bouchées, choisit désormais la rue comme exutoire.
Entre les statistiques froides du rapport et les slogans brûlants des manifestations, une convergence apparaît : le Maroc court le risque de voir sa fenêtre démographique se refermer inexploité d’ici 2040. La jeunesse, censée être le moteur du développement, se transforme en symbole de colère et d’exil. Si rien n’est entrepris, le cri de la Gen Z ne sera pas un simple épisode, mais le symptôme durable d’une crise nationale.