
En Algérie, la tentation de tout contrôler ne connaît plus de limites. Après les voitures, les bus ou même les pneus, c’est désormais l’achat d’or et de bijoux qui passe sous la loupe des autorités. De nouvelles restrictions viennent durcir les conditions d’achat de métaux et pierres précieuses, touchant directement la diaspora habituée à se procurer de l’or lors de ses séjours au pays.
Officiellement justifiées par la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme, ces mesures traduisent surtout une volonté d’ingérence croissante de l’État dans la vie quotidienne et économique des Algériens.
Derrière les nouvelles règles, publiées dans le Journal Officiel* n°57, se dessine un signal politique : rien ne doit échapper au regard de l’administration. Chaque bijou acheté au-delà de deux millions de dinars (7 600 €) est désormais tracé. Passeport ou carte d’identité obligatoires, interdiction des ventes anonymes, obligation d’identifier le bénéficiaire final : le luxe intime et familial se transforme en dossier administratif.
La diaspora, traditionnellement attachée à l’achat d’or et d’argent lors des vacances, se retrouve en première ligne. Pour elle, ce n’est pas seulement une contrainte : c’est une rupture symbolique avec une pratique ancrée, à la fois culturelle et économique. Offrir des bijoux, c’était célébrer le lien au pays et investir dans une valeur refuge. Aujourd’hui, ce geste se heurte à la suspicion institutionnelle.
Sociologiquement, la décision renforce un climat de méfiance entre l’État et ses citoyens. En imposant ce contrôle généralisé, le pouvoir alimente le sentiment que chaque transaction est potentiellement suspecte. Pour les commerçants, déjà fragilisés par la concurrence de l’informel, c’est une couche bureaucratique supplémentaire qui risque de pousser encore plus d’acheteurs vers le marché noir.
Politiquement, ce durcissement illustre un système centralisateur où l’économie est perçue avant tout comme un levier de contrôle social. Alors que la diaspora réclame plus de confiance et de facilités pour investir, elle se retrouve face à un État surveillant plutôt que partenaire.
Au final, derrière le vernis sécuritaire, ces mesures soulignent une réalité : en Algérie, acheter une voiture, un bus… ou même un collier en or, devient un acte hautement politique.