
L’Algérie assiste, impuissante, à l’érosion de son influence énergétique en Europe. Longtemps présentée comme un fournisseur « stratégique » pour le Vieux Continent, elle voit désormais ses parts de marché fondre au profit des États-Unis, nouveaux maîtres du gaz naturel liquéfié (GNL).
Selon une étude de l’OAPEP publiée le 2 septembre 2025, les parts combinées de l’Algérie et du Qatar sont tombées de 36 % avant 2022 à seulement 22 % aujourd’hui. Dans le même temps, les Américains ont presque doublé leur poids, grimpant de 28 % à 46 %, devenant le premier fournisseur de GNL à l’Europe.
Cette bascule n’est pas seulement économique : elle est éminemment politique. La guerre en Ukraine a accéléré la stratégie européenne d’émancipation énergétique, formalisée par le plan REPowerEU, qui prévoit la fin des importations de gaz russe d’ici 2027. Bruxelles impose en parallèle de nouvelles normes environnementales, comme la réglementation sur le méthane (2024), qui compliquent l’accès au marché pour des producteurs jugés peu compétitifs, comme Alger.
En arrière-plan, c’est toute la politique énergétique algérienne qui se trouve fragilisée. Incapable de diversifier son économie, Alger mise toujours presque exclusivement sur les hydrocarbures pour financer ses importations et acheter la paix sociale. Mais avec une demande gazière européenne en déclin structurel, le pays risque de perdre à la fois ses devises et son rôle d’acteur stratégique.
Pendant que Washington capitalise sur sa diplomatie énergétique et que Doha mise sur des investissements massifs, Alger reste engluée dans une gestion technocratique et centralisée, incapable d’anticiper la transition. Même la Russie, pourtant sous sanctions, conserve 17 % du marché européen en 2024, contre 12 % en 2023, preuve que l’Algérie recule plus vite que ses concurrents.
Face à ce constat, l’OAPEP tente de sauver les apparences en plaidant pour que le gaz soit reconnu comme une « énergie de destination » et non plus une simple étape transitoire. Mais le temps joue contre Alger : sa rente gazière, jadis levier d’influence diplomatique, se transforme peu à peu en vulnérabilité stratégique.