Analyse : Crise de pouvoir en Tunisie ou la « Guerre des trois »

La sortie du président Moncef Marzouki lors du congrès de son parti, le Congrès pour la République n’a pas manqué d’étonner. La saillie du docteur Marzouki contre « la volonté hégémonique » d’Ennahda, son allié au sein de la troïka qui dirige aujourd’hui la Tunisie, est loin d’être passée inaperçue. [onlypaid]Le ministre des Affaires étrangères, Rafik Abdeslam qui est également le gendre de l’homme fort du parti islamiste, Rached Ghannouchi, n’a pas attendu longtemps pour répondre au chef de l’Etat tunisien en affirmant que la Tunisie sera dirigée dans les années à venir par les islamistes d’Ennahda. Une manière de renvoyer Moncef Marzouki dans les cordes. D’après des sources diplomatiques à Tunis, le massage de Marzouki n’est rien d’autre qu’une manœuvre politicienne adressé aux militants du CPR pour montrer que le président ne se laisse pas faire devant les « les outrages » que lui infligent les dirigeants d’Ennahda. Toujours selon les mêmes sources, le chef de l’Etat n’est que très rarement consulté dans les affaires gouvernementales par le premier ministre nahdaoui, Hamed Jebali. Cette situation crée beaucoup de tensions entre les deux, mais Moncef Marzouki ne penserait pas, selon ses proches, un seul moment claquer la porte et présenter sa démission. « Marzouki est un idéaliste, mais il adore le pouvoir. C’est un personnage très complexe qui tout en méprisant l’apparat du pouvoir ne veut surtout pas rater l’occasion d’inscrire son nom dans l’Histoire contemporaine de la Tunisie », explique un ambassadeur d’un pays de l’Union européenne qui l’a rencontré à plusieurs reprises ces derniers mois. De l’autre côté, Ennahda sait très bien que Marzouki demeure un personnage très populaire à l’étranger. « Une sorte de caution révolutionnaire », commente un membre du CPR. Mais, Ennahda ne fait pas totalement confiance à Moncef Marzouki. C’est pour quoi, Rached Ghannouchi ménage Mustapha Ben Jaâfar qui pourrait éventuellement faire office de solution de rechange au cas où l’actuel président se montre très gourmand ou un peu incommodant. Ce jeu d’Ennahda envenime les relations entre Marzouki et Ben Jaâfar qui ne s’adressent plus la parole que quand ils y sont obligés, remarque un journaliste tunisien. [/onlypaid]