
Le Maroc s’apprête à réaliser un exploit que peu auraient imaginé il y a dix ans : dépasser l’Italie, berceau de Ferrari, Lamborghini et Fiat, en volume de production automobile.
En 2024, le royaume a fabriqué 559 645 véhicules, frôlant le score italien de 591 067 unités. Et selon les données du premier semestre 2025, la tendance s’accélère : plus de 350 000 véhicules sortis des usines marocaines, en hausse de 36 % en un an. Si le rythme se maintient, le « sorpasso » est attendu dès cette année.
Parti de seulement 40 000 voitures produites en 2010, le Maroc est devenu en une décennie le 25e producteur mondial, devant la Pologne et la Hongrie. Ses avantages ? Une proximité immédiate avec l’Europe, des coûts de main-d’œuvre compétitifs et une logistique portuaire renforcée à Tanger et Kénitra.
Historiquement, Renault et Stellantis ont ouvert la voie. Mais aujourd’hui, ce sont les géants chinois des batteries et des composants électriques tels CNGR, Gotion High Tech, BTR ou encore New Material Group qui dopent l’écosystème, rejoints par des fabricants de pneus comme Sentury et Yongsheng Rubber.
Le royaume détient 70 % des réserves mondiales de phosphate, élément clé pour les batteries de véhicules électriques. Couplé à un accord de libre-échange avec l’UE, ce levier stratégique attire Pékin, qui voit au Maroc une porte d’entrée vers le marché européen tout en évitant d’éventuelles barrières douanières.
Le ministère de l’Industrie marocain vise haut : doubler la capacité de production d’ici 2030, pour atteindre 2 millions de véhicules par an et augmenter de 20 % les recettes d’exportations dans les deux prochaines années. Capital Economics prévoit que ce boom automobile propulsera la croissance marocaine à 4,3 % dès 2025 et plus de 5 % à l’horizon 2027.
Cette montée en puissance inquiète l’Europe. Face à l’afflux de véhicules compétitifs « made in Morocco », dopés par des capitaux chinois, Bruxelles pourrait envisager de nouvelles barrières douanières ou des exigences de contenu local. Mais ces mesures risqueraient aussi de pénaliser Renault et Stellantis, très implantés dans le royaume.