Damas a vraiment pris tout son temps avant d’accepter de recevoir le chef de la diplomatie française, Bernard Kouchner.
Dans un premier temps, la Syrie a purement et simplement annulé la visite de Kouchner à Damas après les «critiques menaçantes» formulées à l’égard de la Syrie par le «French Doctor», qui a accusé-un peu vite- les autorités syriennes d’acheminer des missiles «Scud» au Hezbollah libanais. Bernard Kouchner n’a pu mettre les pieds à Damas qu’après deux coups de fil insistants du président Nicolas Sarkozy à son homologue Bachar Al Assad avec qui il entretient d’excellentes relations. Le président français a par ailleurs tenu a remercier « son ami Bachar » pour les efforts entrepris par son pays pour la libération de Clotilde Reiss accusée d’espionnage en Iran. Entre les deux hommes, c’est Claude Guéant qui fait office de missi dominici, se rendant souvent en Syrie dans le plus grand secret afin d’entretenir le dialogue permanent. C’est d’abord en réaction à Chirac que Sarkozy a très tôt ressenti le besoin de se rapprocher de la Syrie, comme pour exorciser la relation privilégiée qu’entretenait son prédécesseur avec le Liban, et que l’actuel président trouvait trop « déséquilibrante » pour la politique étrangère de l’hexagone dans la région.
En dépit de ces intentions conciliantes, les Syriens – qui estiment que Kouchner a une position pro-israélienne- lui ont infligé une leçon humiliante lors de son passage à Damas. Ceux qui ont assisté à l’audience qui lui a été accordée par Bachar Al Assad ont indiqué que ce dernier était tout le long de l’entretien impassible et distant. Il ne répondait que très rarement aux propos du ministre français. A la fin de la rencontre, le chef d’Etat syrien est devenu plus loquace et a déclaré aux journalistes présents au Palais des Mouhajirines que «l’Occident doit savoir que les temps ont changé, et qu’il ne peut plus imposer ses lois dans notre région».