En ce début du mois de ramadan, un sombre air des années 80 plane sur les villes algériennes. Pénurie des produits de première nécessité, files d’attentes devant les guichets pour manque de liquidités et des grèves récurrentes dans plusieurs secteurs. A Alger, Oran ou Jijel, l’ambiance est à couper au couteau. Les marches, chaque mardi des étudiants et du hirak chaque dimanche, rajoutent un brin de noirceur à ce tableau. Ces images frappantes rappellent aux Algériens d’un certain âge le siècle dernier quand dans milliers d’Algériens faisaient la file devant Aswak El Fellah et leurs rayons efflanqués.
La flambée du mercuriel depuis des semaines et les multiples pénuries démontrent la panne d’une économie « dirigiste » managée avec un esprit des années 70. Les bousculades devant les camions de lait de Giplait à Bab El Oued, les tensions devant les étals d’huile de table «Fleurial» ou encore les disputes pour des sacs de semoule dont le prix n’a pas bougé depuis un quart de siècle dépitent de plus en plus des Algériens. La faiblesse de leur salaires impacte leur pouvoir d’achat qui subit continuellement une érosion vertigineuse. Face à cette situation qui risque de dégénérer à tout moment, le pouvoir algérien demeure pieds et poings liés.
Et pour cause, les gouvernements successifs n’ont pu mettre en place une véritable économie de marché. 30 ans après la chute du mur de Berlin, l’Algérie opte toujours pour un modèle de planification socialiste complètement désuet. A titre d’exemple, la semoule, l’essence et le lait sont encore subventionné par un budget étatique qui prend l’eau de tout part. D’ailleurs, pour résoudre la pénurie de l’huile de table, le gouvernement n’a pas trouvé mieux que de confier la distribution de cette denrée alimentaire essentielle aux Assemblées populaires communales comme c’est le cas ces jours-ci à Jijel. Une solution d’un autre temps pour un problème qui se répète chaque mois.
Aujourd’hui, le régime algérien esquisse une sorte de fuite en avant d’organiser des élections législatives d’ici le mois de juin. « Les Algériens ont besoin de sécuriser leur fin de mois et de manger à leur faim sans bousculades ni scènes humiliantes et non d’un parlement qui n’a aucune influence sur la gestion des affaires du pays », se lamente un ancien ministre retiré de la politique.
Alors, la hausse des prix du pétrole peut-elle constituer une sinécure ? Pas sûr, en raison tout d’abord de la baisse constatée de la production algérienne de pétrole qui constitue un net manque à gagner et de la versatilité des marchés mondiaux qui hypothèque une économie en souffrance.