L’organisation d’un scrutin présidentiel le 12 décembre prochain en Algérie n’est pas une lubie du régime ou un caprice de l’homme fort de l’armée algérienne, Ahmed Gaid Salah. C’est un processus politique important qui engage la survie même du régime algérien. Explications.
Le haut commandement militaire algérien dirigé par Gaid Salah est convaincu que sans une nouvelle autorité civile au pouvoir, les grandes puissances et la communauté internationale ne tarderont pas à exprimer leur hostilité et leur animosité à cette « institution militaire » qui sera accusée de détourner le pouvoir à son compte. Ce scénario est catastrophique pour le régime militaire algérien qui ne se remet toujours pas des vieux démons de la décennie noire des années 90 où l’Algérie était isolée internationalement et boycottée au point où l’achat d’armes et l’approvisionnement de l’ANP était devenu problématique.
Cet « isolement international » dans un environnement géopolitique hostile, l’armée algérienne veut à tout prix l’éviter. Pour cela, elle doit absolument trouver un nouveau Président derrière lequel elle va se cacher donnant l’impression d’un « retour à la normale » en Algérie.
Ensuite, les actuels partenaires internationaux et partisans de l’institution militaire algérienne, à savoir les Emirats, l’Arabie Saoudite et quelques lobbys puissants au sein des gros états européens ne peuvent continuer à protéger et assurer les arrières de ce régime si une nouvelle autorité civile plus au moins légitime n’est pas mise en place d’ici la fin de l’année 2019 sachant que la légitimité constitutionnelle et politique du président par intérim Bensalah est épuisée depuis la fin du mois de juillet dernier.
Si pour le moment Washington est « attentiste » et observe prudemment la situation, la diplomatie américaine de risque de passer à l’action et de menacer le régime algérien si ce dernier tarde à maitriser la situation allant jusqu’à menacer toute la région de sombrer dans une instabilité qui menace les intérêts américains.
L’agenda du 12 décembre prochain répond aussi à des impératifs internes qui empêchent l’annulation de ce scrutin présidentiel. Epuisé et malade, Abdelkader Bensalah ne peut pas continuer sa mission à la tête de l’Etat et il ne pourra pas dépasser la fin de l’année en raison de son état de santé. Son remplacement cause problème et son maintien au cas de prolongement du statu-quo actuel en Algérie est presque irréalisable. L’élection d’un nouveau Président est donc urgente.
Sur le plan économique et financier, l’institution militaire algérienne n’est pas outillée pour poursuivre la prise en charge de ces dossiers et doit absolument confier ces problématiques à une nouvelle équipe gouvernementale capable d’épargner à l’Algérie de sombrer dans la faillite ce qui menacerait les équilibres mêmes de l’armée algérienne.
Face à tous ces paramètres, l’establishment militaire algérien ne pourra jamais annuler le scrutin présidentiel du 12 décembre prochain car il représentera sa dernière planche de salut. Son seul souci aujourd’hui est de gérer la rue en limitant au grand maximum la casse pour laisser ensuite le futur président dialoguer avec le mouvement populaire, alias le Hirak. Du temps gagné dans l’espoir d’étouffer la colère populaire à force d’usure et de lassitude.