Exclusif. Le DRS passe au scalpel les candidatures des successeurs potentiels de Bouteflika. Le plan B est en marche

C’est à dix kilomètres, vers l’ouest de la capitale Alger, dans la caserne de Dely Ibrahim que se réunissent depuis quelques semaines en comité restreint, une dizaine de hauts gradés de l’armée. [onlypaid] A l’ordre du jour de ces réunions, un seul et unique point : trouver un successeur au président Abdelaziz Bouteflika. Jusqu’il y a deux mois, les « influents d’Alger » semblaient privilégier un quatrième mandant pour un président qui, d’après les observateurs avertis des arcanes politiques algériennes, a parfaitement assimilé les règles du jeu en faisant croire que l’armée est retournée pour de bon dans les casernes et qu’elle s’est définitivement rangée de la politique. Aujourd’hui et avec l’accident de santé qu’a eu Abdelaziz Bouteflika, ce scénario apparaît peu probable, en raison notamment des risques politiques qu’il entraîne. L’establishment serait obligé d’organiser en un laps de temps très court deux consultations présidentielles si jamais il perdait Bouteflika en route. Les « influents de Dely Ibrahim » auraient donc, d’après des sources bien informées à Alger, décidé d’actionner le plan B qui serait celui de trouver un successeur à l’actuel président.

Pour cela, le général Mohamed Mediène -chef du DRS- secondé par le général Bachir Tartag, multiplie les réunions avec les principaux généraux de l’armée afin d’éplucher les CV des candidats. Les noms d’Abdelaziz Belkhadem et de Mohamed Ouyahya ont été rapidement écartés à cause de leur impopularité et aussi de leur manque d’aura à l’international. Ahmed Benbitour et Ali Benflis ne semblent pas bénéficier d’un préjugé favorable, même s’ils sont tout de même gardés en réserve. D’après les informations dont dispose Maghreb-intelligence, Ahmed Bebitour « serait incapable de gérer ne serait-ce que deux personnes » et Ali Benflis est qualifié « de cabinard dont les dents rayent le parquet ». Reste donc la génération des historiques élevés au sein du FLN et qui avaient affronté  Abdelaziz Bouteflika en 1999 avant de se retirer à la veille du scrutin.

Le premier d’entre eux est Ahmed Taleb Ibrahimi. Il présente l’avantage d’avoir une sensibilité arabo-islamique très prononcée qui est dans l’air du temps. Cela dit, il a l’inconvénient de l’âge – 81 ans- en plus d’avoir misé en 1999 sur le général Mohamed Lamari qui n’était apparemment pas l’homme fort du régime comme le laissait entendre la presse à l’époque. L’autre figure qui serait dans les petits papiers du DRS, est Mouloud Hamrouch. L’ancien directeur du protocole de Houari Boumediene et de Chadli Benjedid, « fils du système » comme il s’aime se décrire lui-même, est issu de l’armée qu’il avait quittée avec le grade de Lieutenant-colonel. Il a en plus la légitimité du maquis, une connaissance profonde des subtilités politiques et des rouages militaires. Cependant, celui qui a dégommé le général Betchine de la Sécurité Militaire en 1990 quand il était premier ministre, fait peur. Comme c’est l’un des rares survivants ayant travaillé intimement avec Houari Boumediene, il serait tenté de devenir « l’homme fort » du régime. Ce qu’aujourd’hui les hommes influents qui gèrent l’Algérie d’une manière collégiale n’accepteraient sûrement pas. Cependant, il pourrait être une  carte transitoire pour le régime en préparation des élections présidentielles de 2019.

Le nom de Lakhdar Brahimi est lui aussi examiné. Le diplomate chevronné, âgé de 79 ans, connaît très peu l’Algérie et y dispose également de peu de relais, ce qui peut constituer paradoxalement un avantage. Cela dit, connu pour être « l’homme des Américains », sa candidature ne peut être validée par le DRS que si elle intervient dans le cadre d’un « marché de dupes » entre Alger et Washington.

Enfin, la liste des candidats passée au crible par le DRS ne se résume pas qu’à ces noms. Des outsiders pourraient, à la dernière minute, jaillir des chapeaux des militaires. Dans ce cas, le retour de Liamine Zeroual, malgré son refus catégorique, et la possibilité d’une réconciliation avec Sid Ahmed Ghozali, malgré son intransigeance, ne sont pas non plus des scénarios improbables. Tout dépendra des résultats des conclaves de Dely Ibrahim.[/onlypaid]