Jeu de puissances au Mali : le pire est à venir

La junte militaire qui a renversé le 22 mars, le président Amadou Toumani Touré au Mali se donne un peu d’air en adoptant une nouvelle constitution qui proclame dans son préambule l’attachement solennel à perpétuer la démocratie et l’Etat de droit. La junte qui se présente sous le nom du Comité national pour le redressement de la démocratie et la restauration de l’État (CNRDRE), veut aussi donner des garanties à la communauté internationale en affirmant qu’aucun de ses membres ou celui du prochain gouvernement de transition ne peut briguer la députation ou la présidence. Cela dit, la communauté internationale continue d’appeler fermement au retour au processus électoral et au retour d’Amadou Toumani Touré. La réaction la plus virulente est venue de la CEDEAO qui est allée jusqu’à mettre en état d’alerte ses forces armées afin de se préparer à toute éventualité.
Mais ce qui inquiète les observateurs, ce n’est pas tant Bamako que le Nord du pays. Les puissances européennes savent qu’un scénario à la nigérienne est très probable. Avec un peu de pressions économiques, la junte remettra le pouvoir dans un délai que l’on estime raisonnable. Cependant, la rébellion Touarègue conduite par le Mouvement National de Libération de l’Azawad ne veut pas desserrer son étau et continue à proclamer haut et fort son désir d’indépendance. Ce qui bien sûr provoque une réaction très nationaliste dans le reste du pays. En outre, l’Algérie et le Niger ne regardent pas d’un bon œil cette revendication d’indépendance provenant des populations Touarègues, notamment parce que ces deux pays comptent plusieurs centaines de milliers de Touaregs et que si jamais un Etat Azawad s’installe dans le nord du Mali, il jouera le rôle de locomotive identitaire pour les Touaregs nigériens et algériens. D’autre part, l’apparition sur l’échiquier du groupe salafiste radical Ansar Dine, risque de compliquer encore les choses. Soupçonné d’avoir des relations avec la secte nigériane Boko Haram, Ansar Dine inquiète fortement les occidentaux qui voient le Sahel se désintégrer sous leurs yeux. Cette situation a fait dire à un ancien diplomate français en poste à Bamako que « le pire reste encore à venir. Le jeu égoïste des puissances régionales comme l’Algérie et la Mauritanie, ainsi que la mauvaise foie de la France vont jeter cette région dans des décennies d’instabilité ». Prémonitoire.