Propagandiste du régime Ben Ali, reconverti en islamiste opportuniste au service du mouvement Ennahda, Kamel Ben Younes, journaliste et universitaire, est persona non grata au sein de la TAP. Nommé par le chef du gouvernement Hichem Mechichi pour tenir l’Agence Tunis Afrique Presse, ce nouveau pion des islamistes a fait appel à un huissier de justice et aux forces de l’ordre pour prendre ses fonctions au sein de l’établissement malgré le veto émis par les cadres et le syndicat.
Surréaliste. Les policiers ont agressé les cadres et les journalistes, en sit-in, de l’Agence TAP pour aider Kamel Ben Younes à s’introduire en force et de manière rudement furtive dans les locaux. Cet usage de la force, béni par le chef du gouvernement et ministre de l’Intérieur par intérim, Hichem Mechichi, rappelle les pratiques dictatoriales d’un État policier et ravive la contestation. Mais comment un PDG désire diriger une institution en étant rejeté de facto par les employés ?
La réponse est simple. Le très controversé Kamel Ben Younes, snobé et humilié, compte sur le soutien inconditionnel de Mechichi, chef du gouvernement aux ordres du mouvement Ennahda. Le parti islamiste veut mettre la main sur les médias publics en y mettant un des leurs : Kamel Ben Younes, ancien directeur de Zitouna FM, radio à vocation religieuse, avait récemment assisté à une conférence des islamistes aux côtés de Rached Ghannouchi et son gendre Rafik Bouchleka.
En face, les journalistes et cadres de l’Agence Tunis Afrique Presse (Tap) persistent et signent : “Information publique, ni partisane, ni gouvernementale”, renouvellent leur solidarité avec Mouna Mtibaa, présidente directrice générale de la TAP depuis le 11 juin 2020, mais pas que… Ils refusent toute nomination politique parachutée à la tête de l’établissement, prévoient une grève le 22 avril et décident de boycotter toutes les activités du gouvernement Mechichi tout en réitérant leur appel au pensionnaire de la Kasbah pour revenir sur la nomination de Ben Younes.
Pour de nombreux observateurs et figures médiatiques, la démarche gouvernementale, initiée par les islamistes est “un précédent dangereux” et “une atteinte à l’indépendance des médias publics pour le retour des médias gouvernementaux soumis aux diktats des partis politiques”. Ennahda, à la traîne dans les intentions de vote, perd encore du terrain en terme de branding politique et Hichem Mechichi, quant à lui, prouve sa volonté inflexible de se maintenir à la tête du gouvernement ne serait-ce qu’en tant que fidèle serviteur des islamistes contestés.