En Algérie, la valse à la tête de l’Armée nationale populaire ne semble pas prête de s’arrêter de sitôt. L’opération de lessivage au sein des hauts cadres de l’armée, entamée par le général Ahmed Gaïd Salah depuis bientôt deux années laisse les observateurs perplexes quant à ces objectifs. Le premier coup de Jarnac a été asséné par le chef de l’état-major de l’ANP aux généraux proches de l’ancien patron du DRS, le général Mohamed Mediène, aujourd’hui emprisonné à El Harrach. Des chefs de régions militaires sont limogés et remplacés par d’autres jugés plus fidèles. Des patrons de différents corps d’armée sont relevés de leurs fonctions et mis à la retraite. Juste après, Gaïd Salah a procédé au démantèlement du DRS en le rattachant dans un premier temps, sous la pression de Saïd Bouteflika, à la présidence de la république. Et le vice-ministre de la défense pousse son avantage en se permettant de mettre aux arrêts plusieurs généraux emblématiques du contre-espionnage algérien, jadis intouchables.
Mais la lune de miel ne dure pas longtemps entre Ahmed Gaïd Salah et Saïd Bouteflika. Sur fonds d’une contestation populaire sans précédent qui a fini par mettre K.O le pouvoir d’Abdelaziz Bouteflika, le chef d’état-major procède à de nouvelles nominations. Des régions militaires voient parfois jusqu’à trois patrons se succéder à leurs têtes en l’espace de quelques mois seulement. La police change de directeur deux fois en deux mois. Idem pour la gendarmerie nationale et pour certains corps de l’armée. Un ancien officier mis à la retraite n’a pas hésité à rebaptiser l’ANP en « l’armée popcorn », tellement le turn-over est devenu très élevé. « Cela saute de partout. Personne n’a de visibilité. Aucun responsable de l’armée ne sait s’il va rester ou pas et pour combien de temps. C’est le flou le plus total », avoue un haut-gradé de l’armée.
Il faut dire que le généralissime Ahmed Gaïd Salah, qui s’est autoproclamé régent unique de l’Algérie, ne fait confiance à personne. « Il est devenu très susceptible et surtout irascible. Pour lui toute tête qui risque de dépasser au sein de l’institution militaire doit être décapitée rapidement », révèle un officier de l’ANP qui l’avait longtemps fréquenté. Une situation qui met sous stress les cadres d’une armée qui étaient habitués à la stabilité et à des carrières pérennes. « Cela va tôt ou tard se retourner contre Gaïd Salah. Le temps joue contre lui et la colère commence à gronder même dans les cercles qui lui sont proches », croit savoir l’attaché militaire d’une grande ambassade européenne.
