Analyse. Maroc : le glas sonne-t-il déjà pour l’islamiste Abdelilah Benkirane ?

Ils étaient des milliers de manifestants à battre le pavé ce dimanche à Casablanca en scandant des slogans hostiles à Abdelilah Benkirane et à son gouvernement. « L’état de grâce est terminé », estime le directeur d’un journal casablancais proche des islamistes. [onlypaid]Effectivement, il semblerait que le désamour commence à s’installer entre le gouvernement à majorité islamiste et l’opinion publique marocaine. Les causes sont innombrables, selon les observateurs qui jugent qu’Abdelilah Benkirane en a trop fait ces dernières semaines. « Trop d’agitation, trop d’annonces, trop de politique politicienne et peu d’actions concrètes », analyse un ministre de l’équipe actuelle. Certes, la conjoncture est très difficile « l’agriculture souffre de la sécheresse, le tourisme marque le pas et les investissements internationaux reculent », soupire-il. Mais, il n’y a pas que la conjoncture économique difficile que l’on peut incriminer. « Si Abdelilah Benkirane est un polémiste redoutable et un communicant hors pair, il est par contre un piètre chef d’équipe. La primature tourne au ralenti et le désordre s’est vite installé au sein de l’équipe gouvernementale », explique avec beaucoup de lucidité un ancien haut cadre de la primature. Il faut dire que le gouvernement d’Abdelilah Benkirane, assis sur une majorité confortable, avait démarré son mandat sur les chapeaux de roues en promettant de mettre fin à la corruption et aux avantages illégaux dans les rouages de l’Etat. Aujourd’hui, les deux mesures prises, notamment la publication de la liste des bénéficiaires des agréments de transport et le chantier de la réforme des médias publics sont des coups d’épée dans l’eau. Alors, Abdelilah Benkirane et son équipe seraient-ils en danger ? « Pas tout à fait », commente un ancien ministre istiqlalien, mais ajoute-t-il « la méthode Benkirane qui est un mélange de populisme et de paternalisme a montré ses limites. Ce n’est pas pour autant que les jours de son gouvernement sont comptés ». Les manifestations de dimanche, même si elles ne semblent pas avoir ébranlé outre mesure la confiance du chef du gouvernement, sont un véritable avertissement que certains dirigeants du PJD ont saisi. Un réajustement de la méthode Benkirane serait à l’ordre du jour. Le PJD pense déjà à reprendre la main qu’il a partiellement perdue ce dimanche. [/onlypaid]