Les dessous du gros coup de chaud entre les pays du Golfe

Dans la nuit de dimanche à lundi (4-5 juin), Ryad, Abou Dhabi et Manama ont décidé de rompre leurs relations diplomatiques avec Doha. Ces trois pays ont également suspendu toutes relations économiques, politiques, sociales et sportives avec le Qatar, ainsi que les échanges par voie maritime, terrestre ou aérienne. Si la crise couvait depuis déjà plusieurs mois, la rupture totale des relations est vécue comme un véritable séisme, y compris parmi les meilleurs observateurs de la région. D’autant que l’Egypte, le Yémen, le gouvernement libyen de Benghazi et les Iles Maldives se sont joints à l’axe Arabie Saoudite-Emirats arabes Unis. Officiellement, le Qatar est accusé par ces « frères-ennemis » de déstabiliser la sécurité et la stabilité de la région en soutenant les Frères musulmans, Daech (Etat Islamique, autoproclamé), Al Qaïda et les rebelles houthis. Des accusations qui manquent de « sérieux et de crédibilité », jugent plusieurs diplomates européens en poste à Doha. De fait, les Frères musulmans sont d’irréductibles ennemis d’Al Qaïda, organisation elle-même en concurrence avec Daech. Tous sunnites, ils combattent avec force les chiites houthis au Yémen.
Pour tenter d’expliquer cette soudaine poussée de fièvre, plusieurs sources bien informées évoquent la complexité de la situation dans les pays du Golfe. Tous les yeux sont en effet rivés sur la succession en Arabie Saoudite, pays dans lequel une très curieuse partie de roulette russe se joue entre les différents clans d’Al Saoud, notamment chez les princes héritiers entre Mohamed Bin Salmane et Mohamed Bin Nayef. Partie arbitrée par le patron de la garde nationale Mutaib Bin Abdalah, ancien prétendant au trône qui n’a pourtant pas encore dit son dernier mot. Sur ce terrain, les Emirats Arabes Unis qui appuient le prince Mohamed Bin Salmane, craignent que le Qatar n’entre en jeu pour fausser la donne. La récente sortie de l’émir Hamad Bin Khalifa Al Thani, le père du Qatar, dans laquelle il se réclame de la branche de Mohamed Bin Abdelwahhab – caution religieuse de la monarchie saoudite -, n’a fait qu’ajouter à la confusion et jeté de l’huile sur le feu. Elle a été considérée comme une ingérence dans les affaires internes des Al Saoud. Une ligne rouge franchie par le Qatar qui a précipité le Golfe dans une crise sans précédent.  

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