Face à l’Algérie, Mohammed VI réussit la « diplomatie de l’étouffement »

Accueil triomphal partout en Afrique, présence permanente dans les sommets organisés sur le continent, politique de partenariat win-win, pragmatisme et audace avec les adversaires les plus acharnés, tel sont les ingrédients de la nouvelle diplomatie chérifienne sous la conduite de Mohammed VI. Et manifestement, cela porte ses fruits. En janvier 2017, Rabat retrouve un siège au sein de l’Union africaine qu’elle avait quitté en 1984, à l’époque l’OUA. Le Maroc siège désormais aux côtés de son ennemie jurée la République arabe sahraouie démocratique (RASD, autoproclamée) qui crie déjà victoire. Le royaume chérifien aurait-il reconnu la République sahraouie ? Peu importe, répondent les diplomates marocains, l’essentiel pour Rabat est d’être pleinement membre des instances africaines, le reste viendra avec le temps.

En novembre 2017,  le Maroc pousse plus encore son avantage. Le sommet Europe-Afrique est rebaptisé sommet UA-UE, signifiant la participation de la RASD. Ce qui semblait être une défaite diplomatique est vite transformé par Mohammed VI en une franche victoire. A Abidjan, toutes les attentions vont vers le souverain alaouite. Lors de l’ouverture du sommet, il siège aux côtés du secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres. Le roi du Maroc déroule, devenant la nouvelle attraction diplomatique en Afrique. Il enchaîne les rencontres avec les chefs d’Etat du continent, le président français Emmanuel Macron ne le lâche pas d’une semelle, le président gabonais Ali Bongo, ami intime du souverain, se permet même de lui raconter des blagues en pleine séance de photo officielle. Et cerise sur le gâteau, le premier ministre algérien, Ahmed Ouyahia, s’empresse de lui serrer la main avec franchise. Pour ceux qui doutent encore des choix diplomatiques de Rabat, le chef de la diplomatie marocaine Nasser Bourita explique que « le Polisario est invisible ».

Et Mohammed VI n’en reste pas là. Il marche sur les plate-bandes algériennes, en recevant le président sud-africain Jacob Zuma, l’un des adversaires les plus virulents du Maroc en Afrique sur la question du Sahara occidental. L’entretien entre les deux hommes est « chaleureux et empreint de franchise », rapporte la MAP, l’agence de presse officielle marocaine. Les deux pays décident de désigner des ambassadeurs de haut niveau dans les deux capitales, la brouille entre les deux pays n’est plus qu’un vague souvenir. Auparavant, le roi avait reçu le nouveau président angolais, Joao Lourenço. Rabat et Luanda qui n’ont jamais été très proches semblent amorcer un virage dans leurs relations bilatérales.

Enfin, le souverain chérifien a été invité à participer, le 16 décembre prochain, au sommet de la Cedeao qui aura à se prononcer sur la candidature de Rabat. Pour le Maroc, l’Union du Maghreb arabe (UMA) est bel et bien enterrée et c’est la communauté économique de l’Afrique de l’Ouest qui la remplacera désormais.

« Le Maroc encercle doucement, mais sûrement, l’Algérie. En une dizaine d’années, Rabat a totalement changé de cap. Pas d’ennemis, pas de politique de la chaise vide, pas de polémique superflue », nous confie un diplomate français en poste en Afrique.

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